Back to school ! - Charlène

Trois jours. Sebastian avait eu trois jours pour se remettre de ce fameux Nouvel An festif où les discours de bonnes résolutions s'offraient après le premier, deuxième, troisième verre.. Ce passage lui avait fait de l’œil cette fois-ci. Evidemment, il avait surestimé son système immunitaire et ce matin-là, il avait mal. Il n'avait plus l'âge pour ce genre de connerie. Ainsi, le train-train quotidien devait reprendre. Il avait passé la nuit sur le canapé à zapper les chaines mais le marchand de sable, lui, n'avait pas fait son boulot. Et après, ça parle de devenir plus raisonnable.
Le ciel s’éclaircissant de plus en plus donnait l'ordre au trentenaire d'aller prendre sa douche avant de réveiller la dernière qu'il gardait cette semaine. Il fit chauffer une tasse de café et un petit bol de chocolat, revint sur ses pas pour porter Lyla encore amollie et l'installa sur le canapé. Il s'affala à ses côtés, les rôles s'inversant petit à petit. Une petite heure plus tard, il se gara sur le parking des professeurs en face du lycée après avoir déposé sa puce à l'école. D'ordinaire, il privilégiait la moto, mais dans ces circonstances, il se devait de trouver des avantages d'avoir une voiture. Premièrement, il pouvait ouvrir la fenêtre, s'installer confortablement sur son siège, sortir une cigarette et la fumer sous un fond de Pixies. Trois minutes de pure détente, les yeux clos, les sons hors champ balayés. Un sourire se dessina machinalement sur son visage; il pensait à l'un de ses collègues, professeur d'éducation physique, qui était présent à cette soirée. Avec un peu de chance, il n'allait pas être le seul à reprendre avec une tête de revenant.
Il coupa le contact, balança son mégot par la fenêtre avant de la remonter et de sortir de sa voiture. Il salua poliment deux adultes discutant dans leur coin, s'étirant de manière nonchalante devant eux, traçant son chemin sans tenir compte de leur réponse. Il ne commençait qu'à l'heure d'après, chanceux qu'il était. Il allait pouvoir savourer sa double dose de caféine en toute tranquillité. Malheureusement pour lui, le brouhaha de la salle des profs fut aussi intense que celui des couloirs du bâtiment. Pourquoi les gens devaient-ils être aussi enthousiastes à une heure aussi précoce ? Ou du moins, assez en forme pour jouer les commères un matin ? Non, les discussions n'étaient pas intéressantes, leur vie n'était pas intéressante non plus, alors il avait tracé jusqu'à la cafetière, se posant tranquillement au coin de la salle. La porte s'ouvrit de nouveau et un léger sourire se posa sur son visage. Charlène venait d'entrer, Charlène, c'était la conseillère d'orientation, un poil psychologue à ses heures perdues aussi. Charlène, c'était aussi l'une des rares membres du système éducatif avec laquelle Sebastian entretenait de bon rapport. Cool, il n'allait plus être le seul à cracher sur la tête de ces vieux cons. Mauvaise foi : Charlène n'était pas leur bouc-émissaire.

" Toujours le mot pour rire à ce que je vois.". Sauf qu'elle avait raison. Parce que Sebastian avait mis du temps à pondre sa réponse, sans parler du fait qu'il dormait à moitié sur la table. Et après, ça fait la morale sur la tenue à adopter en cours. " Non justement, elle est passée bien vite. Peut-être un peu trop, puisqu'elle a oublié de me prendre au passage. ". Il soupira. Il se fatiguait lui-même avec les conneries qui sortaient de sa bouche. D'une traite, il se redressa et bu l'intégralité de sa tasse, sans sucre. Grimace. Pour la forme olympique, on repassera.. " Vous êtes une énigme pour moi. Tous autant que vous êtes." . Pas forcément, puisqu'un mode de vie sain suffisait juste, il le savait. Les plus âgés avaient une bonne excuse. Mais Charlène, il la connaissait assez pour savoir qu'elle ne passait pas forcément ses weekend farniente. Mais elle pétillait, pas de marque, soin évident. Il pouvait constater la même chose avec Serena d'ailleurs. Ah, la jeunesse. Il sortit la caméra frontale de son téléphone, "admirant" son reflet avec horreur. Il essaya tant bien que mal de plaquer les quelques mèches rebelles vivant leurs aventures, caressa machinalement sa barbe, qui allait probablement passé sous le rasoir d'ici peu et remonta sa main jusqu'au front. Assez, il rangea son téléphone, alla se resservir un café et s'assit de nouveau face à sa collègue, hâté pour changer de sujet. " Et toi alors ? Qu'est-ce que tu racontes de beau ? "