les courses, l'endroit où on veut pas aller mais où on y est obligé (Jazz)

Ce soir, j’ai invité mes parents à manger. Les derniers résultats financiers de la boutique sont loin d’être aussi bons que ce qu’ils étaient à l’époque où ils la géraient encore et malheureusement, c’est le genre de choses que je dois leur annoncer. J’ai donc décidé d’enrober le tout dans un bon petit repas préparé avec amour, histoire d’arrondir les angles. Je ne suis pas certaine que cela aura l’effet escompté mais qui ne tente rien n’a rien parait-il. Je me dirige donc vers mon supermarché habituel, espérant qu’il n’y aura pas trop de monde. Je déteste passer des heures à faire mes courses et encore moins attendre à la caisse. Je regarde l’heure sur mon portable et me détend en me disant qu’à cette heure un jeudi soir, les gens doivent être encore au travail.

Je prends un caddie et arpente les rayons. Je remplis le caddie au fur et à mesure avec les ingrédients dont j’ai besoin et j’en profite également pour prendre quelques trucs à manger pour la semaine, histoire de ne pas avoir besoin de revenir de si tôt. Soudain, je remarque une scène qui me fait légèrement sourire dans le rayon céréales. Je regarde cet homme et son fils alors qu’ils abordent une pub avec des lutins. Adorant les enfants et n’ayant pas la chance d’en avoir moi-même, je me permets d’intervenir. J’attrape un paquet au passage, mes céréales préférées enrobées de chocolat et je m’approche vers le duo.

« Je serais toi, je prendrais ces céréales là. Elles sont au chocolat et en plus elles font voir des lutins. Elles sont tellement magiques qu’ils ne les passent pas à la télévision. »

Et j’adresse un sourire complice au père comme au fils, espérant que l’adulte ne m’en voudra pas trop d’intervenir de la sorte alors que c’est lui le parent et que je n’ai aucune raison de me mêler de ce qui ne me regarde pas.

Visiblement, mon geste est plutôt apprécié, que ce soit par l’enfant que par le parent, ce qui me rassure. En voulant aidé, je m’étais fait à nombreuses reprises mettre à ma place parce que « je me mêle de ce qui ne me regarde pas » apparemment. Néanmoins, je crois que ma sympathie me perdra toujours puisque je n’hésite jamais à renouveler l’expérience. C’est dans ma nature que voulez-vous ?! Je hoche de la tête alors que le garçon me demande s’il pourra vraiment voir des lutins et je lui fais même un petit clin d’œil, même si je ne suis pas certaine qu’à son âge, il comprenne le sens de ce geste. Puis, je m’adresse au papa.

« J’en mange depuis toute petite et ce sont vraiment mes préférées donc je pense qu’il aimera. »

A moins qu’il soit vraiment difficile, ou qu’il ait des goûts qui ne sont pas du tout en adéquation avec les miens mais bon, partons sur le fait que l’enfant est comme tous les autres. J’observe tout de même le paquet que l’homme me montre avant de faire une grimace.

« Personnellement, elles ne m’ont jamais donné envie celles-ci. »

Après, chacun ses goûts comme on dit et c’est vrai que le paquet peut donner envie mais non, pas pour moi.

« Ce ne doit pas être évident de faire des courses avec un enfant de cet âge. » Je me permets de lui demander avant de rajouter quelques arguments à cette réflexion. « Mes parents m’ont souvent dit qu’ils ne m’emmenaient plus avec eux lorsque j’étais petite car je voulais tout le temps acheter plein de cochonneries. » Et je me mets légèrement à rire en m’imaginant la scène, même si je n’ai aucun souvenir de cette période.

L’homme me fait sourire. Il y a cette affection entre lui et son fils. Même sans les connaitre, j’arrive à les ressentir. Il est pourtant rare de voir une telle complicité entre un père et son fils. D’ailleurs, rien qu’un homme faisant des courses c’est assez extraordinaire je trouve… « Le chocolat fait fondre tout le monde. On gagne à tous les coups avec. » Je finis par renchérir. Bon, ça ne marche pas avec tout, la preuve en étant la marque qu’ils ne voulaient plus prendre mais bon, ça reste une généralité. « Oui, je vois. » Je n’ai ni enfant ni neveu mais étant moi-même une fana de céréales, je ne peux que comprendre où il veut en venir. Et nous ne le dirons à personne mais les jouets dans les paquets de céréales, je suis la première à m’éclater avec…

On en vient ensuite au fait de faire les courses avec ses enfants. Visiblement, ça n’a pas l’air de déranger le brun plus que cela, si ce n’est l’addiction de son fils pour les publicités. « La télévision est la voix de la sagesse pour les petits. » Je me mets à rire doucement, me demandant si j’étais pareil petite. « Vous n’aviez pas des défauts du genre vous à son âge ? » J’ajoute doucement en riant. Ensuite, on évolue avec le temps et on finit par réclamer autre chose. Une fois adulte, plus de soucis car on peut acheter littéralement tout ce qui nous donne envie à condition d’avoir le budget qui correspond. « Je suis bien contente d’être adulte et de pouvoir prendre tout ce qui me plait en tout cas. » En face, tout un tas de paquets de bonbons. J’en montre un du doigt, mes préférés. « Comme ça par exemple. »