Entre six yeux - ft Damien & Anton

Du sofa couleur cacao devant la télé, deux têtes dépassaient des oreillers: une tête blonde couverte d'une capuche orange avec des oreilles rayés noirs et une touffe noire, toute ébourrifiée et presque inapercevable par le fait qu'elle était trop enfoncée sur l'oreiller. L'homme poussa un soupir à mesure qu'avec ses yeux bleus las regardait la télé défilée toutes les quarts de seconde d'une chaine à l'autre. "En même temps, si tu veux vraiment voir s'il y a quelque chose de bien, peut-être vaudrait-il mieux que t'arrêtes de zapper et que tu regardes comme il faut jusqu'au bout. " Reprocha-t-il, légèrement exaspéré. Les pieds sur sa table basse, les bras au dessus de sa tête alors qu'il est tout mou sur celui-ci, le parrain attrapa vivement la télécommande lorsque la jeune fille se releva de son divan chéri - le seul et unique amour de sa vie. "Il est huit heures choupette, l'heure pour les petites d'aller faire dodo." La taquina-t-il en prenant une voix aiguë et bienveillante et lui lançant un regard amusé. Il essayait de la provoquer et elle le savait, puisque de tous les adultes responsables, son parrain n'en était pas un, et surtout pas avec une gosse de dix sept ans. À son âge, il passait trois nuits consécutifs en dehors de la ville avec des gens qu'il venait de rencontrer au bar le soir même, des touristes ensuite. Alors lui imposer des couvres feu ? Aura pouvait bien se balader torse nu dehors, le seul truc qu'il fera, serait de la filmer avec son tel et l'ajouter dans son dossier de photos comprometantes de la jeune fille - peut être même la poster, tiens ? - Et les parents d'Aura n'ont vraiment aucune idée avec qui ils avaient affaire lorsqu'il la laissait là. Pas qu'il s'en souciait de toute façon, alors autant qu'elle en profite ? Damien mima l'action de vomir et puis éclata de rire, ne supportant pas lui-même de jouer sa marraine la bonne fée. Prenant en main la télécommande, il arriva sur une série de chaines visées aux femmes aux foyers arriva des séries tel que Desperate Housewives ou Top Model, ou encore une de ses télé réalité de relooking et puis ferma complétement la télévision, se redressant. Le Cole pivota vers sa filleule en posant la télécommande sur la table. "Il est plutôt encore trop tôt pour la télé, tu veux dire. On se tape un film à la place ? Tu choisis: horreur ou comédie ?" Damien se releva de son canapé avant de s'avancer vers sa bibliothèque, où il avait rangé ses DVDs, dont quelques uns qu'il avait louer et qu'il n'avait pas encore eu le plaisir de regarder, et appela sa filleule pour faire de même. Lorsque soudainement, il y eut un bruit sourd près de la porte, qui arrêta net le parrain dans sa recherche et releva la tête vers la provenance de ce son. Il ne savait pas si c'était la porte qui a toqué ou quelque chose d'autre provenant du couloir. "Anton ?" Dit-il sans aucune conviction. Était ce lui, ou un voleur qui s'est glissé dans l'une des chambres ? Ou pire encore, sa mère qui serait venu à l'improviste par la fenêtre une fois encore - pour une autre visite surprise ? D'une façon ou d'une autre, il était bien trop distrait pour avoir bien discerner correctement le genre de bruit..

Plus tôt en début l’après-midi:

« 3 linguinis de courgettes aux épices, 4 pâtes pesto, 2 taglioni à l’encre de seiche, 1 tartare de bœuf salade sucrine mozza ». Anton retenait ce qu’on venait de lui annoncer et qui était à lancer. Une grande tablée avait pris place sur le coup de 12h30 et un anniversaire allait donc être célébré. Par conséquent, il était évident que sur la part de dessert, il y aurait des bougies pour accompagner l’événement. Le service traina plus qu’à son habitude, la pression était toujours là en cuisine pour que tout soit parfait.

Le restaurant était presque plein et avec cette grande tablée, cela tenait les personnes en cuisine occupées un certain moment. Puis bien plus tard, le personnel débarrassa le restaurant, Anton soufflait enfin. D’ailleurs il s’octroya un verre de vin rouge. Le temps de nettoyer la cuisine de façon à ce qu’elle soit comme neuve. C’était essentiel que ce lieu soit bien tenu, à la perfection même. Sur le coup de 15h30-16h, il quitta le restaurant. Pas de service ce soir, exceptionnellement. Il n’était pas mécontent car en période estivale, cela lui permettait de profiter un peu de certaines soirées. Que ça soit avec sa sœur, sa copine et/ou des amis.

En soirée:

La fin d’après-midi l’avait maintenu en partie chez lui à retaper une étagère puis s’ensuit un footing le long du lac avant de rentrer se doucher. Anna n’était pas là ce soir. Sortie de son côté avec des amis. Qu’allait-il faire de sa soirée ? Se regarder un DVD tranquillement sur la télé qui avait été livrée il y a peu de temps ? Lire un bouquin ? Prendre un verre en ville peu importe avec qui ? Il appela rapidement sa sœur, Sara, pour s’assurer que tout allait bien de son côté.

En redescendant en cuisine après s’être vêtu d’un sweat-shirt et d’un jean, converses aux pieds, il regarda ce qu’il avait dans le frigo, puis dans les placard. Une idée pour manger un petit quelque chose, pas forcément consistant ou long à préparer. Cela fusa rapidement dans sa tête bien évidemment, puis il remarqua ce carton qui trainait par terre près de l’îlot de la cuisine. Ce carton, il l’avait ramené du restaurant dans l’après-midi, en le tenant entre lui et le guidon de sa moto. « Hmmm » fit-il en réfléchissant de ce qu’il en ferait.

ça pourrait faire l’affaire. Il saisit deux bouteilles de bons vins italiens et deux trois ingrédients complémentaires. Il fourra le tout dans un sac, prit le carton, clefs de moto et autres clefs et parti de chez lui. Cela ne prit pas si longtemps que cela de rejoindre l’immeuble de Dam, son meilleur pote. Pas toujours besoin de lui envoyer un message à l’avance, il pouvait très bien passer à l’improviste après-tout ! C’était un peu ça entre eux. Mi casa es tu casa comme on dit. Il arriva donc au bon étage et ouvrit l’appartement car bien sûr, il détenait un double de la clef.  Pourquoi ? Au cas où il y ait le moindre problème pendant l’absence de Damien, c’était toujours plus rassurant de savoir que quelqu’un en qui on a confiance peut venir inspecter les lieux. Anton n’avait pas encore filé des clefs de chez lui ceci dit car il venait d’acheter cette maison il y avait peu de temps et il était encore occupé avec certaines choses vis-à-vis de l’intérieur. ça lui était sorti de la tête. Il ouvrit donc cette porte d’entrée et n’avait pas entendu l’interrogation de son ami. Heureusement sinon il aurait été du genre à sortir une connerie. « Dam t’es là ? J’nous ai apporté de quoi boire, j’espère que t’as des trucs bons à manger et pas périmés comme l’autre fois. C’est une insulte que de laisser des trucs pourrir tu le sais ça ! ». Il débarqua directement vers le salon, toujours les mains encombrés et vit son ami, mais pas seule.

Il fit mine en parlant tout bas, faussement paniqué « Alors ne bouge surtout pas…. tu as un tigre derrière toi… ne te retourne pas ! ». Il fouilla dans son carton histoire de voir ce qui pourrait être divertissant car lui-même n’avait pas complètement inspecté le contenu depuis le restaurant. « Mais je crois que ils aiment bien les maracas….. » il lança les deux objets l’un après l’autre à l’autre adulte de la pièce pour qu’il les rattrape et il poursuivit en même temps « … et les chapeaux mexicains…. arriva arriva ! ». Il ricana brièvement après ces derniers mots prononcés avec une voix proche de celle de speedy gonzales. Il précisa que cet attirail adoucirait le tigre, forcément.

« Salut le fauve ! Tu as encore fugué ? » lança t-il à Aura qu’il avait instantanément reconnu depuis son arrivée. « Vous avez mangé ? » demanda t-il aux deux personnes présentes. Puis il revint sur des paroles précédemment prononcées en s’adressant cette fois-ci à Aura « Eh, je ne déconnais pas tout à l’heure pour les trucs qui datent et traînent dans le frigo. Sérieusement, je ne sais pas comment ton parrain ne t’a pas encore empoisonné, l’autre fois il y avait des oranges ou je ne sais quoi si pourries dans son frigo qu'elles étaient déformées à un point… difficile de déterminer ce que c’était d’ailleurs. ça bougeait presque. Un peu plus et on pouvait leur donner un nom comme à un humain… ».

Il entra comme chez lui, dans la cuisine et vida son sac avec les bouteilles de vin et les quelques ingrédients amenés. Puis il posa le carton contenant encore des choses sur la chaise et expliqua cela « il y avait un anniversaire au restau ce midi… des mexicains ». Puis reprenant un ton normal « je ne dérange pas au moins ?! ». Quand bien même ça serait le cas, il était déjà là de toutes façons et n’avait pas particulièrement l’intention de repartir de suite.

 
 

À la réplique de la jeune fille, Damien pivota vers Aura. Un sourcil élevé et le regard sceptique, ça l'indignait que la blonde puisse oser lui dire ça. Lui, avoir peur ? Jamais ! "Y'a pas moyen que je craques, l'horreur c'est mon truc ! Tu es né cent ans plus tard pour me dire ça, jeune fille ! Toi, je parirais 50 piges que tu tiendrais pas tout le film." Il n'avait même pas besoin de parier, il en était sûr. Et par la suite, Damien savait que c'était lui qui devait s'en occuper, qu'elle viendra sûrement dans son lit ayant peur de rester toute seule et laisser une lumière dans sa chambre - alors qu'il ne peut dormir que dans le noir complet. Mais bon, c'est elle qui l'a cherché; il l'avait prévenu et c'est à elle d'en subir les conséquences. Anton apparu du cadre de la porte, et Damien souffla discrètement de soulagement. Il n'avait pas envie qu'Aura ou Anton se moque des lui: ses deux là trouvait toujours un moyen de l'embêter. Un duo inséparable quand il s'agissait de se moquer de lui. Damien éclata de rire et joua avec les maracas qu'Anton venait de le lui lancer. "Aïe caramba, una puma ! " dit-il en prenant une voix aigüe et laissa l'adolescente prendre ses maracas et jouer avec pendant qu'il rigola un peu plus sur la blonde. À l'entente de la fugue de la jeune Connor, Damien échangea un regard avec Anton puis haussa les épaules. Le brun ne pouvait rien y faire lorsqu'il s'agissait de ses parents; c'était peut-être ses plus proches amis, mais la mère -avec qui il était très amie à l'université- avait changé depuis son mariage et ne voyait plus de la même façon, et encore moins ce qu'endurait vraiment sa fille. Le parrain d'Aura était content de pouvoir être une sorte de support pour elle, et c'est pour la même raison qu'il lui a fait connaitre Anton. Ses deux sont devenus inséparables, plus que de simples disciples et mentors, une autre personne avec qui Aura pouvait parler et que Damien pourrait lui confier. Ils s'aidaient mutuellement et s'amusaient à leur façon, surtout pour le taquiner. Et quand il s'agissait de sa cuisine, les deux cuistots ne lui faisaient pas de quartier. Et les voilà justement reparti... "Il a plus rien mon frigo. Ce truc - comme tu le dis -, c'était la voisine qui m'avait offert ce ragoût au boeuf et c'était déjà périmé. Elle m'avait aussi envoyé ses oranges, mais j'y ai pas touché, j'me suis dis que ça ira mieux dans le frigo...et bah non. D'ailleurs, j'accepte plus rien d'elle, c'est fini...">Répliqua-t-il, dégoûté en se rappelant de la mutation que ça a créé au final et les jours qu'il a passé à nettoyer son frigo et à l'aérer. Ça a pué dans toute la cuisine et toute la maison. Il n'avait invité personne dans sa maison et a dormi les fenêtres ouvertes cette époque là, alors que c'était en hiver. "Eh, tu t'y mets pas toi aussi ! Ments pas filleule indigne, comme tu es. Mes lasagnes étaient pas mal, tu t'es même resservie ! Et puis, j'ai suivi la recette d'Anton à la lettre. Te moquer de ma lasagne, c'est te moquer de ton mentor... " Souligna-t-il, sachant que la jeune fille respectait beaucoup la cuisine de l'italien. Damien la respectait aussi, mais c'était surtout son ventre qui en été soumis. La première fois qu'il en a goûté, le Cole a passé toute une semaine au restaurant du cuistot parce que tout autre met l'empoisonnait. "Et puis merde, vos gueules et dépêchez vous de choisir un film -Anton aides là, apparrement, elle sait pas c'est quoi choisir- ou je vous chasses d'ici. La prochaine fois, faites les vous même vos dîners les cuistots, moi j'propose plus rien !" Ajouta-t-il, contrarié et boudant ses deux individus qu'il considérant comme proches. Il s'installa dans le canapé, des nachos qu'il a piqué qui provenait des cartons d'Anton et attendit que les deux autres choisissent le film. Il ruminait des choses à leur égard, sur leur manque de solidarité et de délicatesse lorsque leur cuisine n'était pas aussi raffiné que la leur. Il était pas cuistot lui, non ? Son domaine, c'est le droit. Ça c'était son truc. Leurs places sont dans une cuisine, la sienne est dans un procès. Et chez lui, bien sûr. Quoi de mieux que chez soi ? Home Sweet Home. "et j'allais pas crier, encore moins comme une gonzesse. Alors là, tu te fourres totalement le doigt dans l'oeil ! Non mais, oh." grogna-t-il.

Anton était un peu dans sa bulle mais encore bien conscient de ce que Damien et Aura disaient. C’était marrant des fois, il les regardait interagir comme l’on regarderait l’écran de la télévision. Il était là, physiquement présent mais son esprit était quelques secondes ailleurs. Il les observait et se laissait divertir par la complicité évidente qui existait entre le parrain et sa filleule. Il fut ramené à la réalité lorsque son prénom retenti. Damien venait de le solliciter pour le choix d’un film visiblement. Film sur lequel ils n’étaient pas parvenu à se décider quelques instants auparavant. « Rooooh ça va, fais pas le susceptible…. » dit-il en laissant les affaires dans le carton, posé à terre avant de rejoindre le canapé du salon.

« Bon, entre quoi et quoi alors vous hésitiez…. ? Sérieusement j’espère que c’est pas un petit navet parce que là… je vous aime mais je gâcherais clairement ma soirée… ». Anton n’était pas un romantique dans l’âme, alors les films à l’eau de rose, trop peu pour lui. Cependant, quand on lui tendit les deux films qui faisaient l’objet du débat, il haussa les sourcils surpris de la nature de ces derniers. « Oh…. mais c’est pas mal ça… bon en gros vous me demandez d’aider à faire un choix comme entre Game of Thrones et Walking Dead…. Pas cool… » fit-il comme s’il s’agissait de la décision de sa vie.

Evidemment, le cuistot était un fervent utilisateur du hasard (pile ou face par exemple) pour prendre certaines décisions ou bien le chifoumi marchait bien aussi. D’ailleurs, Aura le savait car il suffisait qu’il dise « Aura, on choisit à 3 ? » pour qu’elle sache de quoi il parlait. « Bon je prends celui-là » au hasard complètement il en désignait un, laissant l’autre pour Aura si elle gagnait au pierre-feuille-ciseaux. Ils firent donc ce jeu de mains et Aura remporta la manche. « Hep Hep toujours deux ! C’était peut-être un coup de bol… viens par là ». Voulant gagner à son tour, ils refirent une manche et Aura gagna encore une fois. Le grand brun s’adressa à Dam pour lui donner la résultat « Bon, et bien ce soir, ce sera “The Devil’s Backbone” » . Il lança l’objet vers Dam pour qu’il le rattrape, comme il le faisait toujours. Anton fila en cuisine et affirma à voix haute pour que les deux entendent « Qui dit film dit truc à grignoter. Vous voulez quoi ? Je préviens ça ne doit pas prendre plus de 5 minutes chrono en main…. ».

Avant que la jeune fille balance une idée, Anton anticipa « … et pas de popcorn ce soir… autre chose. Les popcorn ça sera chez moi une autre fois. Allez j’écoute les propositions…». Le grand brun fouillait déjà dans les placards de la cuisine et lançait à son pote « Tu sais que les femmes, tu dois les séduire par la nourriture… franchement si t’as rien dans tes placards j’vois pas comment tu peux les attirer Dam. Imagine, une nana se pointe ici, a l’intention de manger un truc, tu fais quoi ? ». L’italien emprunta un ton faussement exaspéré.